Interview : Nastasia Saby
En novembre 2021, j’ai discuté avec Nastasia, qui donne régulièrement des conférences et a bien voulu partager son expérience. Voici les notes, dans un style très oral, que j’ai pris pendant cette discussion.
Peux-tu te présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Nastasia.
Je viens du monde backend.
Puis je me suis mise dans la data, je suis spécialisée dans la production de machine learning.
Ça fait un petit moment que j’ai commencé à donner des conférences, je pense que j’aime beaucoup ça.
Je me suis mis à écrire aussi, je pense que c’est dans la même veine : il y a quelque chose d’assez ressemblant.
Tu présentes des conférences depuis quelques années ; tu as compté combien de temps ça fait, combien tu en as fait, sur combien de sujets… ?
La première fois, ça faisait deux ans que je taffais ; et, aujourd’hui, ça doit faire huit ans.
J’en ai fait pas mal. Et il y a eu des fois où j’en ai fait beaucoup, il y a eu des années où j’en ai presque fait une par mois.
Pas forcément des trucs genre le Forum PHP ou quoi, mais des trucs dans des meetups et ça m’est arrivé d’en faire beaucoup beaucoup.
Aujourd’hui, j’en fais moins, aussi pour me consacrer plus à l’écriture.
Quand tu dis que tu en faisais une par mois : c’était le même sujet que tu redonnais à des meetups différents, ou c’était à chaque fois un sujet différent ?
Je ne redonne jamais exactement la même chose ; mais je vais préciser, sinon ça serait impossible à travailler : j’ai tendance à énormément me dire « là c’est des data scientists que j’ai en face de moi, donc il y a des choses qu’ils savent déjà et ça ne sert à rien de leur dire. Là par contre c’est des débutants donc il faut que je leur dise d’autres choses ».
Donc, généralement, j’ai un sujet (par exemple : démarrer avec spark, que j’ai fait plein de fois), mais à chaque fois je reprends le truc pour l’adapter au public qui est en face.
Donc, à chaque fois que tu prépares une conférence, la première fois que tu parles du sujet, tu passes beaucoup de temps à le préparer de façon un peu globale et ensuite tu repasses quelques heures à chaque fois pour le fine-tuner ?
C’est ça.
Pour essayer d’être dans la cible. Alors, des fois, ça m’est arrivé de me louper, de me rendre compte que la cible que j’avais en face de moi n’était pas celle à laquelle je m’attendais, mais j’essaye de faire ça.
Et, des fois, ça peut être la langue aussi qui change.
Tu fais des conférences, aussi, qui ne sont pas en français ?
À part un LFT (NdA: conf au boulot), j’en ai fait une fois, en anglais.
Tu as commencé il y a six ans, ça faisait deux ans que tu bossais, donc tu commençais à avoir des trucs à raconter… Qu’est-ce qui t’a poussé à donner la première ? Pourquoi est-ce que, la toute première fois, tu as été en conférence en te disant « je vais parler » ?
Ça faisait un moment que j’y pensais, mais que je n’osais pas…
Et la toute première, c’était dix minutes aux Human Talks.
Et, en fait, si je le faisais, j’avais droit à une place au MixIT. Je sais que je ne suis pas la première à avoir fait ça, et du coup c’était ça.
C’est la petite carotte qui m’obligeait à y aller. Ça a beaucoup été mon driver pendant un petit moment : j’en avais envie, mais ça m’obligeait.
Après, c’était le PHP Tour, bah pareil : ça permet d’avoir une place, souvent, dans la conférence.
Et en plus, je trouve, une place un peu privilégiée : on se retrouve vraiment propulsée avec toutes les personnes qui vont parler, au resto on discute avec plein de monde de plein de sujets.
Et même, quand on donne une conférence, à la fin, les personnes viennent poser plein de questions (et pas juste après, mais aussi parfois plus tard sur LinkedIn ou autre) et c’est hyper enrichissant.
Alors que si on ne présente pas, les gens ne viennent pas vers nous.
Donc, étrangement, c’est nous qui présentons, mais je trouve qu’on a une position où on se fait plus enrichir qu’en étant simple spectateur.
Qu’est-ce qui fait que tu continues, que tu en donnes autant depuis quelques années ?
Ça déjà, c’est resté, ce côté se faire enrichir.
Mais il n’y a pas que ça : des fois, je travaille sur des sujets et ça leur donne du sens, un cadre.
Ça te permet de revenir sur ce que tu fais et de raconter une histoire ; et, donc, de plus maitriser ce que je fais.
Les idées de sujets dont tu parles, j’ai l’impression que ce sont des idées qui correspondent à des choses que tu fais au bureau, des choses sur lesquelles tu travailles, des choses que tu expliques à tes collègues… Est-ce que tu cherches surtout à présenter des choses que tu as bien faites, des choses que tu aurais plutôt mal faites et où tu souhaites que d’autres ne fassent pas les mêmes erreurs que toi ?
Je pense que j’ai un gros biais par rapport à ça : je présente des choses que j’ai faites.
Je sais que certaines aiment présenter un nouveau framework qu’ils ont testé un peu chez eux ou autre, moi c’est généralement des trucs qui ont été faits en entreprise ; c’est rare que je prenne autre chose. Ça peut être des lectures, par exemple.
Et du coup j’ai un peu tendance à trop raconter les « succès ».
Et c’est un peu dommage, parce que ce n’est pas toujours là où on apprend et ça donne trop l’image de « ce que j’ai fait c’est trop bien » alors que c’est aussi cool des gens qui viennent raconter ce qui s’est mal passé. C’est quelque chose à faire davantage. Mais ce n’est pas facile, tu te mets en danger…
En général, comment ça se passe ? C’est toi qui vas proposer des sujets à des organisateurs ? Tu réponds à des CFP ? Ou des organisateurs viennent te chercher ?
Je crois qu’aucun organisateur n’est venu me chercher.
Je réponds à des CFP. Souvent, j’ai une idée et je regarde où ça peut matcher.
Je me rappelle d’un ScalaIO autour de « Apache Spark / Machine Learning, rêve et réalité » et mon truc c’était à peu près la même chose, donc je me suis dit « mais je suis trop dans la cible, j’y vais ! ».
Des fois, les organisateurs précisent un petit peu ce qu’ils veulent.
Comment prépares-tu un talk ? Est-ce que ta façon de travailler une conférence a évolué avec le temps et l’expérience ?
Oui, il y a des choses qui ont évolué.
Au départ, quelqu’un m’a mentoré, j’ai gardé beaucoup de choses de ça, n’empêche.
J’ai beaucoup fait post-it, remplir ma fenêtre de post-it, réfléchir aux choses que je vais mettre avant même de toucher aux slides.
Je répète énormément, mais vraiment énormément.
Quand tu dis énormément, c’est une fois, dix fois, cinquante fois ? Et tu répètes dès l’étape où tu as des Post-its et des idées, tu commences à la vocaliser ? Ou tu attends plus tard pour faire des répétitions ?
Pas 50, mais 10 fois, oui.
Et je n’attends pas que les slides soient parfaites pour commencer à répéter, parce que quand je répète, je me rends compte qu’il y a plein de trucs qui ne vont pas, donc j’itère. Ça m’arrive d’avoir des slides sales en mode ça fait mon post-it et je ne les finalise qu’à la fin.
Et y’a un truc qui a changé depuis que j’ai commencé à écrire des articles de blog, tout ça : ça aide énormément d’avoir écrit des pages et des pages pour préparer le truc. C’est pas mal organisé dans sa tête, il y a moins de taf.
Et ça m’a beaucoup aidé ces dernières années.
Tu as fait collège, lycée, tu as appris à remplir des copies doubles au lycée et maintenant que tu écris des livres, tu essayes d’enlever du contenu et simplifier des phrases… Est-ce que c’est quelque chose que tu mets en application dans ton discours ?
Nan.
Je pense que je suis beaucoup trop stressée pour changer ça, en fait.
Donc j’y vais en mode freestyle. J’écris quand même à peu près ce que je vais dire, pour l’avoir en tête, parce qu’en live coding ce n’est pas facile…
Tu fais des live-coding ?
Oué. Et c’est un peu whoohoo.
Comme j’ai du mal à gérer tous les écrans, là, je répète énormément parce que je sais que c’est tout au souvenir.
Après, c’est aussi facile : avoir du code, ça donne une bouée.
Mais oué, c’est vachement du par cœur.
Et quand tu bosses ton contenu, que ce soit l’étape des Post-its, les slides, ou même les répétitions, est-ce que tu fais ça toi seule avec tes idées, ou est-ce que tu essayes d’itérer avec des collègues pour avoir des retours sur le contenu, sur la présentation ?
Je l’ai fait au début, demander à des gens.
Aujourd’hui, je ne le fais plus du tout.
Mais surtout parce que je n’ose pas.
Ce n’est pas parce que je me dis « je n’ai pas besoin », mais je me dis « non, je ne vais pas les embêter, c’est bon je me débrouille ».
Donc aujourd’hui c’est rare que j’aie une répétition avec quelqu’un avant le truc.
Tu parlais de stress. Tu te souviens, ta première grosse conférence (un Forum PHP), comment tu as dormi ? Est-ce que tu as réussi à manger un petit déjeuner ?
Alors, la première fois oui, mais j’ai eu des fois bizarres, en termes de stress…
Je ne suis pas sure que la première fois ait été la plus stressante.
Je crois que j’ai eu une prise de conscience à un moment donné, j’étais stressée, mais y’a eu un moment je me suis demandé « mais qu’est-ce que tu fous là » et j’ai eu des coups où la voix se coupe.
Avant de monter sur scène, ou une fois lancée ?
Avant de monter sur scène, en mode j’essaye de parler et ça ne vient pas.
Je pense que personne n’a remarqué, mais moi je savais qu’à ce moment-là j’essayais de parler et ça ne passait pas.
Et à un moment, j’ai cru que ça ne me quitterait plus jamais… Et, heureusement, c’est parti.
Et au moment où tu montes sur scène ?
Je continue à l’être (stressée), malheureusement, j’ai l’impression qu’on l’est tous.
Et tu te détends au bout d’un moment, à force de parler ? Tu arrives à « oublier » ton stress ?
Oui, oui.
Sinon je crois que j’aurais arrêté.
Heureusement, ça se détend un petit peu.
Ça revient au moment des questions.
Est-ce que tu aurais des recommandations du genre (un truc que je dis souvent aux gens que je mentore) « ne vas pas au talk avant le tient, pour te permettre de respirer, de faire le silence dans ta tête pendant une demi-heure avant de monter sur scène » ?
Ah c’est marrant, moi je fais le contraire. Enfin, pas exactement.
Je suis dans la salle où va être mon talk, même si c’est un truc qui ne m’intéresse pas du tout, où je ne vais rien comprendre — de toute façon, la plupart du temps, mon cerveau n’arrive pas à imprimer ce qui est en train de se passer. Mais je préfère être là, je suis juste à côté et je suis prête.
J’ai eu des astuces qui m’ont aidée, mais qui m’aident moins aujourd’hui.
Par exemple, quand j’étais chez Zenika qui propulsait bien les conférenciers et conférencières, j’y allais avec mon polo Zenika ; ce n’était pas pour faire de la pub pour Zenika, mais ça me donnait une légitimité « vous voyez moi aussi je travaille, j’ai un boulot, comme vous, donc j’ai le droit de parler », en mode Zenika est OK avec le fait que je vienne parler.
Maintenant, ça va mieux, mais pendant longtemps ça m’a aidé.
Est-ce que tu sens que ton niveau de stress, aujourd’hui après six ans, est différent ou plus faible de celui de tes premières conférences ? Est-ce que tu te sens plus assurée au moment de monter sur scène ?
Je pense que je suis toujours autant stressée, mais je suis plus assurée, je me sens plus de légitimité.
Je me dis « j’ai le droit de parler, comme tout le monde », alors qu’au tout début, j’avais l’impression que les speakers c’était des dieux vivants ; maintenant, je me rends compte que non et qu’on a tous des trucs intéressants à dire.
Tu ne t’es jamais dit « et si dans la salle y’avait la personne qui a créé le framework dont je vais parler ou qui a créé l’outil dont je vais parler ? »
J’avais vu une conf une fois où quelqu’un présentait Scala, avec le mec de Scala qui rentre dans la salle. Il est super sympa en plus, le créateur de Scala, mais c’est vrai que le speaker était hyper stressé.
Mais je pense qu’il a bien fait d’avouer clairement « je ne pensais pas que Martin Odersky serait là » et ils ont eu une conversation, au final. Mais oué, ça peut être hyper stressant.
Ce que je me dis, c’est que tu présentes en tant qu’utilisatrice ; et en ça tu restes légitime.
Mais oué, tu n’es jamais à l’abri que quelqu’un te dise à la fin que tu es complètement passée à côté du truc.
Tu as fait des conférences à distance, pendant cette année magique ? Quel a été, pour toi, l’élément le plus difficile ? Et le plus facile ?
Oui, j’en ai fait.
Le plus facile, déjà, c’est qu’on s’ennuyait tellement que c’était très agréable de retrouver, même virtuellement, du monde.
On ne voyait pas les personnes, ça enlève un peu de stress, je trouve. Enfin, ça stresse moins, mais il y a le côté de se rendre compte que j’ai dit des trucs et me demander pourquoi je les ai dits. Alors que d’habitude, ça me censure de voir les gens, là je suis un peu en roue libre comme devant un miroir.
Plein de trucs difficiles.
Par exemple, au début, je ne savais pas du tout faire. J’ai bossé tes vidéos. J’ai essayé de m’adapter, je pense que ce n’est pas parfait, mais que je ne me rendais pas compte du truc. Y’a des petites difficultés du genre j’ai une chatte et elle pousse la porte, elle ne la referme pas bien sûr, et ça peut arriver à n’importe quel moment… Et c’est hyper gênant quand je vois dans la caméra que d’un coup la porte s’est ouverte.
Après, c’est quand même moins marrant, malgré tout. Même s’il y a des échanges à la fin.
Je suis contente qu’on soit revenu un peu en présentiel.
Que ce soit en présentiel ou à distance, après ta présentation, est-ce que des membres du public, ou peut-être de l’équipe d’organisation, t’ont fait des retours, des commentaires (je ne parle pas de questions), des suggestions d’amélioration ?
Les critiques négatives ne sont arrivées que quand on interrogeait les personnes.
Je pense que les personnes n’osent pas venir pour dire « tu aurais pu mieux faire » si on ne leur pose pas la question. Ce qui peut être un peu dommage, d’ailleurs, parce du coup tu ne t’améliores pas forcément.
Même les critiques positives, ce ne sont pas des critiques, c’est rarement « ce passage là était bien parce que ci ou ça ».
Tu parlais d’anglais, tout à l’heure… Tu as fait une conférence en anglais. Pourquoi pas plus ? Pourquoi tu en as fait en anglais ? Qu’est-ce qui était facile, difficile ? Est-ce que tu craignais l’exercice ?
À ce moment-là, je parlais anglais tous les jours au taf, donc ça aidait ; et j’ai fait plein de petites présentations. Et donc je me disais « autant faire une conférence en anglais, à l’extérieur ».
Je craignais quand même de le faire en anglais, malgré tout. Trouver mes mots en anglais, je vais baragouiner, mais je vais toujours réussir à dire ce que je veux dire. Par contre, la personne en face (un Allemand) pour les questions et un peu de discussion avait un bon accent et j’avais peur de louper parfois un petit peu ce qu’il voudrait dire ; et c’était un peu stressant.
Mais c’était comme le taf, où je parlais avec des personnes d’autres pays, en anglais.
Je pense aussi que j’y suis venue parce que je partageais beaucoup de conférences à mes collègues, mais la moitié ne parlaient pas français et ça m’agaçait de leur proposer des contenus auxquels ils ne pouvaient pas accéder. Si je n’avais pas eu cette expérience, je ne suis pas sure que j’aurais eu envie d’aller parler avec des non-francophones.
Je n’en ai fait qu’une, parce que c’est difficile à trouver. Le contexte « en ligne » fait que c’était plus simple, mais je n’ai malgré tout pas trouvé tant d’opportunités que ça. J’en ai même proposé une en anglais et finalement les organisateurs m’ont dit « on aimerait bien que tu le fasses en français ».
Tu parlais des questions : tu disais que tu craignais un peu les questions et tu en as reparlé quand tu parlais de ton collègue allemand. Pourquoi est-ce que c’est difficile ? Qu’est-ce qui te fait peur dans les questions ? Ou, au contraire, peut-être, pourquoi est-ce que tu apprécies les questions ?
Je crois que je n’apprécie pas les questions.
En tout cas, pas en direct.
Qu’après les gens viennent, je trouve ça cool.
Mais en direct, j’ai l’impression que c’est un exercice où il faut trouver une réponse… Peut-être que je me mets trop la pression, mais j’ai l’impression de répondre systématiquement à côté de la plaque.
C’est une impression que toi tu as ? Ou on te l’a confirmée ?
J’ai essayé de me faire confirmer, et j’ai l’impression que c’est une impression.
Mais je trouve que ça donne un côté très solennel, par rapport à la discussion qui va être à côté, dans un couloir, je trouve que la partie question a une attente…
Et ça me stresse.
Assez souvent dans les conférences, on donne un slot d’une certaine durée et tu l’utilises un peu comme tu veux. Est-ce que tu laisses du temps pour les questions ? Ou est-ce que tu essayes de ne pas laisser de temps à la fin de ta conférence ?
Je laisse du temps pour les questions. Je le fais quand même.
Mais j’avais vu qu’il y avait des personnes qui assumaient et qui disaient « venez me voir dans les couloirs ou après ».
Et il y a aussi des gens (dans le public) qui n’osent pas (poser de question).
Une petite succession de questions courtes, j’essaye de collecter quelques points de données :
Quelle durée pour tes talks ? Tu as une préférence ?
Ou très court et très ciblé (10 minutes pour présenter un bouquin que tu as lu ou un truc comme ça), ou alors plus long (40-50 minutes).
Je trouve les formats genre 20 minutes un peu difficiles, comme, en littérature, les novellas que personne n’achète : ce n’est pas percutant comme une nouvelle, ça ne dit pas tout et je trouve que même pour le public, ce n’est pas forcément intéressant et je ne sais pas où m’arrêter. J’ai déjà essayé et ça n’a jamais été une réussite. Je peux comprendre l’idée de se lancer dans un tout petit truc, mais autant que ce soit vraiment petit et que ce soit ce à quoi tout le monde s’attend.
Tu sais combien de slides tu fais par minute, ou c’est super variable ?
Ça m’avait beaucoup perturbé à une époque, parce que je voyais des gens qui disaient « il faut passer au moins une minute sur une slide » et ce n’est pas du tout mon cas, donc c’était un peu l’angoisse en mode « est-ce que je réécris tout ? ».
J’en mets peut-être deux par minute, peut-être une et demie, je ne sais pas, mais en tout cas j’en ai plusieurs (slides par minute). Donc des slides très courts avec une seule idée, et change pour n’afficher qu’une chose à la fois. Ça dépend beaucoup de ce qu’on met dessus.
Quel logiciel utilises-tu pour tes slides ? Pourquoi ?
Slides.com C’est du clickodrome. Je les paye, j’étais allée jusqu’au bout, tu peux faire ta propre CSS. Mais une fois je m’étais donnée de ouf et j’avais eu un bug… Je ne prends plus la meilleure option. Je crois que je me suis habituée à ce logiciel. Et un truc tout bête par rapport à Google Slides, où je n’arrive pas à gérer la transparence des titres.
Tu sais à peu près combien de temps tu mets à préparer un talk ? Genre la première fois que tu vas parler d’un sujet ?
C’est une bonne question, parce qu’il y a déjà tout ce que tu as fait en amont (comme écrire des articles)… Je pense que ça prend du temps. Je ne dirais pas 100 heures. Je ne dirais pas 10 heures. Je dirais un intermédiaire. Il y en a où ça va vite parce que ça a beaucoup été buché en amont. Mais peut-être 30 heures pour la première fois. Je suis incapable de faire la veille.
Je ne voudrais pas déprimer les personnes qui vont lire, mais il y a eu une époque où je passais plus de temps. Et j’ai eu une mauvaise expérience (conf beaucoup beaucoup préparée, je n’ai jamais autant préparé avec sérieux, et au final j’ai eu beaucoup de retours négatifs sur cette conf — c’est peut-être pas dû à ça) et ça m’a gonflé. Et après cette mauvaise expérience, je suis remontée sur le cheval, mais j’y passe moins de temps qu’avant. Et j’arrive quand même à un résultat. Même si je suis moins perfectionniste.
Et au niveau professionnel, est-ce que tu as le sentiment que ça t’a apporté (voire ça continue de t’apporter) quelque chose ?
Oui quand même.
Je fais des conférences, la plupart du temps, sur des trucs que j’ai faits et même que j’ai mis en prod.
Ça me permet donc de faire une boucle quand j’en reparle aux collègues.
Et est-ce que ça (je vais poser la question super directement) t’a aidé à avoir un job ?
Oui.
Mon précédent job, mon manager m’a envoyé un message sur LinkedIn en me disant « je vous ai vu au BlendWebMix, on peut discuter ? ». Donc oui.
Et je pense, je m’avance peut-être, que ça aide vraiment.
Y’a pas que ça, ce n’est pas parce qu’on parle qu’on est un bon dev, mais ça aide.
Tu écris en ce moment un livre, ton second. Est-ce qu’il y a un lien entre tes XP de speaker et d’autrice ? Est-ce qu’avoir fait l’un te pousse à faire l’autre ?
Je pense que oui… Et non.
Oui dans le sens où il y a vraiment l’idée de partager, que j’aime bien.
Quand tu écris 100 pages sur un truc, que tu dois donner une conf dessus après, la préparation est tellement plus facile.
Je pense qu’il y a aussi autre chose dans l’écriture : il y a plein de façons de partager et quand tu choisis celle-ci, ça apporte aussi des choses différentes, tu vas plus profondément dans les trucs.
Et ce n’est pas forcément le même public.
Un dernier conseil que tu donnerais à une personne qui envisagerait de se lancer pour son tout premier talk ?
Le truc qui m’a le plus bloqué… Je parlerais de légitimité.
Souvent, j’ai l’impression que les personnes ne se sentent pas légitimes.
Et on est forcément légitime, même s’il y en a qui disent « mais lui il a fait 1000 fois plus de programmation fonctionnelle que moi », ce qui est intéressant c’est toi : on est tous des individus avec une expérience et c’est ça qui fait que ça va être intéressant.
Je rejoins l’idée du retour d’expérience.
Tu as déjà mentoré quelqu’un, Marine. C’était même un cas marrant parce que vous aviez proposé des sujets qui étaient super similaires, on (NdA: j’étais dans le jury de sélection des talks pour cet évènement) a retenu les deux et on s’est « quand on aura dé-anonymisé, on va retenir une des deux personnes plutôt que l’autre ». On te connaissait à l’AFUP Lyon, tu avais déjà parlé chez nous. On ne connaissait pas Marine, c’était son premier talk et on s’est dit qu’on allait plutôt favoriser quelqu’un de junior. Mais que ça serait cool si tu pouvais la mentorer… Tu nous as dit oui, merci ! Pourquoi tu as accepté de mentorer quelqu’un ? Que penses-tu avoir apporté à cette personne ? A-t-elle eu le sentiment que ton accompagnement l’a aidé ? Et toi, qu’en as-tu tiré, pourquoi fais-tu cela ?
Généralement, les conférences ont tendance à faire le contraire, prendre la personne qu’ils connaissent déjà.
Et j’avais trouvé ça vraiment génial… Alors, pas de me faire jeter… Mais que ça soit pour une super bonne raison.
Et je trouve que c’est hyper rare et ça a plein de valeur.
Je n’ai mentoré que Marine jusqu’à présent.
D’autres personnes m’ont posé des questions, j’ai aidé de manière informelle, mais officiellement qu’une fois.
Je voulais le faire parce que j’ai été mentorée et je voulais rendre la pareille.
J’avais trouvé ça génial, surtout quand tu te lances, c’est quand même un peu la flippe les premières fois et donc j’avais envie de rendre ça.
Et c’était vachement intéressant, aussi parce qu’on avait des sujets proches, donc c’était marrant de voir comment elle l’avait traité — et pas du tout comme moi — c’était super intéressant.
C’est quelque chose que tu referais ?
Oui, c’est quelque chose que je referais. J’avais trouvé ça vraiment cool.
Et un truc bien, contrairement à être dans l’organisation qui est du travail récurrent, c’est que c’est un one-shot, et tu aides.
Tu étais dans l’orga d’un évènement récurrent. Qu’est-ce que tu dirais à un/une speaker pour qui l’évènement que tu organises serait le premier ? Quelqu’un qui vient te voir, qui te dit « ouais, j’ai une petite idée, mais je ne suis pas sûr(e) que ça intéresse le public… ». Est-ce que tu as un moyen, un peu de l’encourager, de l’aider peut-être à construire son sujet ?
Rassurer la personne, ça serait la première chose, parce qu’il y a une question de légitimité.
Après, je pense que je lui raconterais comment moi je le vis.
Même si je lui dirais que ce n’est pas une vérité absolue.
Et je lui dirais qu’il y a un bouquin qui va sortir (rires).
Non, mais c’est vrai, y’a des ressources, et de s’en inspirer.
Je crois que j’ai fait le tour des beaucoup trop de questions que j’avais… Merci beaucoup Nastasia !
De rien :-)
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